Choice - A New Standard for Competition Law Analysis?

CHARBIT Nicolas , NIHOUL Paul , RAMUNDO Elisa

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Description du produit

Résumé

Onze contributions tendent à promouvoir le choix du consommateur en le présentant sous divers angles afin d’en mesurer toutes les potentialités. Paul Nihoul livre la première d’entre elles sous le titre “ʻFreedom of choice’ : the emergence of a powerful concept in European competition law”. Il examine les décisions emblématiques de la Commission européenne dans lesquelles le concept a été mis en avant (Microsoft, France Télécom, Intel). Il les met ensuite en perspective avec des arrêts fondamentaux tels que Hoffmann-La Roche, United Brands, Michelin I. Puis, il relève combien la liberté du choix s’insère dans une analyse multicritère à l’égard de laquelle la hiérarchisation ne peut se faire qu’au cas par cas. Rappelant que la concurrence est un processus, Paul Nihoul conclut de manière convaincante que la liberté du choix, avec la capacité de changer d’opérateur qui l’assortit, ne peut être qu’au cœur de ce processus.

Neil Averitt et Robert Lande prennent le relais dans un formidable élan (de la page 43 à 121 !) avec un intitulé qui campe l’étude aux États-Unis “Using the ʻconsumer choice’ approach to antitrust law”. Ils entendent contrecarrer l’idée selon laquelle le choix du consommateur offrirait une approche moins scientifique que le paradigme des prix ou de l’efficience. Selon eux, il serait bien plus opportun en ce sens qu’il permettrait de couvrir l’ensemble des situations : celles où la concurrence se ferait par les prix et celles tout aussi nombreuses, sinon plus, où la concurrence serait dictée par la qualité, la diversité, l’innovation. Leur objectif est de jeter les bases empiriques de ce paradigme dans une analyse au cas par cas à travers des études rétrospectives mais aussi expérimentales afin de répondre aux exigences légitimes de prédictibilité et d’“administrabilité”. Du point de vue américain, une telle approche conforte la mission de la FTC dans son articulation entre l’antitrust et la protection du consommateur. De plus, les auteurs font valoir à l’appui de nombreux exemples que le choix du consommateur est en définitive le fondement implicite de nombreuses affaires et est en totale adéquation avec le consensus qui s’est finalement imposé dans la politique antitrust.

Vient ensuite un article de Peter Behrens pour donner une consolidation historique forte au choix du consommateur dans le berceau européen de la politique de concurrence : “The consumer choice paradigm in German ordoliberalism and its impact on EU competition law”. Il revient sur les contresens qui ont malheureusement entaché l’ordo-libéralisme et souligne l’approche systémique qui sous-tend le concept d’ordre. Cela lui permet ensuite de rappeler que Eucken et Böhm voyaient dans les consommateurs les arbitres du processus concurrentiel. Puis, exposant l’évolution de l’ordo-libéralisme, il constate que le paradigme sert le processus de découverte permanente selon la vision de Hayek. Puis, il confronte le choix du consommateur avec le concept de “consumer welfare” en tenant heureusement compte des différences de perception entre l’École de Chicago et le courant post-Chicago, marqué par une sophistication de l’analyse. Pour conclure, la liberté de choix du consommateur est présentée comme un mode de perfectionnement du courant post-Chicago, dont le prisme paraît trop étroit.

Robert Lande revient ensuite à la charge avec “Consumer choice, the best way to re-center the mission of competition law”, qui est une réactualisation d’un article ancien. Elisabeth de Ghellinck apporte la vision économique de Louvain avec “Consumer choice : an economic perspective”. L’auteure choisit de concentrer son étude sur une seule dimension du choix : la variété de produits. Tout en admettant les limites du paradigme actuel de l’efficience, elle le relativise notamment dans la pratique de la Commission européenne qui combine les preuves quantitatives et qualitatives. Elle ajoute aussi que les facteurs de concurrence sans les prix sont également dans les études de ratios. Enfin, elle considère que le paradigme du choix du consommateur ne suffit pas à surmonter les insuffisances du paradigme actuel, notamment lorsque les facteurs de concurrence sont en conflit ou encore dans les hypothèses de défaillance du marché. La solution qu’elle préconise tient à une meilleure appréciation des trois différentes dimensions de l’efficience (allocative, productive et dynamique) pour une meilleure élaboration de la “theory of harm” dans chaque cas particulier.

Quant à Joshua Wright et Douglas Ginsburg, ils s’attachent à présenter “The goals of antitrust : welfare trumps choice”. Ils viennent en contrepoint de la position défendue par Averitt et Lande. L’adoption du choix du consommateur comme paradigme constituerait, selon eux, une révolution qui se retournerait contre l’intérêt bien compris des consommateurs. Ce serait une approche non économique de l’analyse antitrust en ce sens qu’elle serait totalement déconnectée de la théorie et de la pratique de l’économie moderne. Elle réduirait le “consumer welfare”, notamment dans les paramètres de la qualité et de l’innovation que veulent défendre ses promoteurs.

Steven Anderman, en tant qu’Européen, est plus circonspect, comme le laisse supposer l’intitulé de sa contribution : “Consumer welfare and consumer choice in the reconciliation of the conflicts between competition law and IPRs”. Il est vrai que le choix du consommateur a été largement mis en avant par la Commission et le juge européen pour poser les limites de l’exercice des droits de propriété intellectuelle. Il en est résulté que les règles européennes en ont été appliquées plus sévèrement, mais avec une plus grande prédictibilité, ce qui est un paradoxe pour un concept critiqué en raison des difficultés à le cerner.

On retrouve ensuite une deuxième fois le duo Neil Averitt et Robert Lande sous le titre “Consumer choice : the practical reason for both antitrust and consumer protection law”. Ils développent en réalité une idée déjà défendue plus haut. Puis, Neil Averitt revient en solo pour expliquer “How ʻconsumer choice’ can unify the fields of competition and consumer protection law”. En nouveau contrepoint, Thomas Rosch intervient ès qualité d’ancien commissaire de la FTC pour répondre à la question suivante : “Can consumer choice promote trans-Atlantic convergence of competition law and policy ?”. Il doute qu’une convergence soit vraiment désirable et, en tout état de cause, une définition commune lui semble assez improbable. Enfin, il s’emploie à souligner les limites du concept du fait même que le consommateur risque fort d’être souvent manipulé.

Ceci ouvre la voie à la dernière contribution sur les “behaviorial economics” sous la plume de Maurice Stucke : “When more is better and when less is more : behavioral antitrust and choice”. On sait que les économistes du behaviorisme considèrent que les individus n’agissent pas toujours de la manière prédite par les théories néoclassiques. De manière générale, il est permis de penser que les consommateurs auront le sentiment d’un accroissement de bien-être face à une diversité de choix. Ce sera le cas tout particulièrement dans le domaine des médias en raison de la faible substituabilité des produits. Cependant, il arrive aussi que la multiplication des choix amoindrisse le bien-être. Le pouvoir de marché excelle à accroître une diversité qui n’est qu’apparente au détriment du consommateur et de la société dans son ensemble. “Choice overload” est donc un vrai sujet de préoccupation pour lequel la littérature économique n’a pas encore fourni un cadre analytique.

En conclusion, nous ne pouvons que constater que le point d’interrogation dans le titre de l’ouvrage se justifie. La promotion du concept est magistralement défendue par deux auteurs américains à travers quatre contributions très substantielles. Il n’en demeure pas moins qu’ils semblent encore très loin de susciter l’adhésion aux États-Unis d’Amérique mêmes. Du côté européen, les juristes sont beaucoup plus enclins à défendre le paradigme du choix du consommateur, mais les économistes restent très réservés. L’ouvrage ne peut que nous rendre encore plus attentifs aux motivations de la Commission et du juge européen dans leur mise en avant au cas par cas du concept, qui reste prometteur.