Les accords de report d'entrée - Contribution à l'étude de la relation du droit de la concurrence et du droit des brevets

CHAIEHLOUDJI Walid

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Résumé

La thèse de M. Walid Chaiehloudj a été soutenue le 7 décembre 2017 à l’université d’Aix-Marseille, sous la direction du professeur David Bosco. Cette étude a été récompensée par le prix de cette Revue. M. Chaiehloudj est désormais maître de conférences à l’université de Grenoble.

L’acquisition d’un monopole en droit de la concurrence peut être le résultat d’un droit de propriété intellectuelle, qui assure à son titulaire une position dominante sur le marché considéré. Cependant, des obstacles peuvent s’ériger au maintien d’une telle position. Ceci est notamment le cas lorsque le brevet – alors instrument de monopole – est susceptible de basculer dans le domaine public, à la suite d’une action en contestation.

Pour pallier ce risque, les opérateurs économiques ont développé une pratique contractuelle qui a pour effet de maintenir et/ou de prolonger les effets de ces droits de propriété intellectuelle à l’égard d’entreprises concurrentes, ou potentiellement concurrentes. Ces pratiques se sont principalement développées dans le domaine pharmaceutique, au sein duquel les laboratoires dits “princeps” vont payer les “génériqueurs” afin de garantir leur monopole sur le marché considéré. Ainsi, moyennant une rétribution, les laboratoires s’assurent de leur position de monopole, tout en sachant, parfois, que leur brevet ne revêt pas les conditions posées par la loi.

Cette présentation succincte de l’objet de l’étude de M. Chaiehloudj révèle, d’une part, l’importance de ces questions et, d’autre part, l’opportunité de la rencontre du droit de la concurrence et du droit de la propriété intellectuelle afin d’assurer un traitement juridique de cette catégorie d’accord.

La première partie (P1) de cette étude s’intéresse tout d’abord à l’émergence des accords de report d’entrée. Par une analyse de droit comparée, le premier titre (T1) est consacré à la genèse de ces accords. Dans un premier temps, ces pay-for-delay agreements sont apparus aux États-Unis par l’instrumentalisation de la loi Hatch-Waxman, dont l’objectif était d’inciter les génériqueurs à contester les brevets pharmaceutiques fragiles. Dans un second temps, l’auteur analyse les raisons de la prolifération de ces accords dans l’espace européen, qui, pour leur part, résultent en revanche de l’exploitation par les laboratoires pharmaceutiques des faiblesses du droit des brevets européens.

Dans un second titre (T2), l’auteur propose une taxonomie des accords de report d’entrée. Si l’effet recherché est le même, la diversité se révèle à l’étude de leur nature respective. Ainsi, certains sont de nature commerciale tandis que d’autres mettent un terme à un litige de brevet. Ces derniers sont l’instrument principal du report d’entrée, dont la pratique par les laboratoires a d’ailleurs révélé une évolution. L’auteur identifie à cet égard les accords de “première génération” qui sont des accords transactionnels moyennant une contrepartie financière et les accords de “seconde génération”, dont le paiement est réalisé en nature.

Dans une seconde partie (P2), M. Chaiehloudj étudie le traitement juridique de ces accords à l’aune du droit antitrust. Dans une démarche prospective, l’auteur présente dans un premier temps (T1) le système de contrôle en droit américain et en droit européen, puis tire les conséquences de ses observations en formulant dans un second titre (T2) un certain nombre de propositions destinées à pallier ce qu’il considère comme les lacunes du droit européen.

Aussi, le chapitre 1 du titre 1 présente tout d’abord le système de contrôle américain, dont il démontre qu’il est, selon lui, bien plus équilibré que celui mis en œuvre par l’Union européenne. En effet, alors que la Cour suprême impose l’application d’une règle de raison, laquelle oblige les autorités de contrôle à mettre en balance les effets pro- et anticoncurrentiels des accords, la Commission adopte une position plus ferme en traitant ces accords par la mise en œuvre de la restriction par l’objet. Selon l’auteur, cette méthode n’est pas la plus opportune, eu égard à la faible expérience de la Commission européenne sur le sujet. Il appelle alors à la substitution de la méthode en vigueur par celle de la restriction par les effets, permettant la prise en considération des potentiels effets proconcurrentiels de ces accords.

Une fois cet examen établi, dans le titre final, l’auteur propose diverses solutions, aussi bien en droit de la concurrence qu’en droit des brevets. Du côté du droit antitrust, l’auteur suggère la mise en place d’une procédure dite de “bifurcation” vers le juge des brevets afin qu’il vérifie la validité du titre de propriété intellectuelle. Du côté du droit des brevets, il est prescrit un renforcement de la procédure d’examen par l’Office européen des brevets ainsi que l’adoption d’une prime d’exclusivité européenne qui permettrait d’inciter les génériqueurs à contester les brevets qui ne remplissent pas les conditions du droit des brevets.

En définitive, si l’auteur ne conteste pas que les accords de report d’entrée puissent avoir des effets anticoncurrentiels, il considère également que le droit de l’Union devrait adopter une position plus mesurée, laissant la voie ouverte à la prise en considération des potentiels effets proconcurrentiels de ces accords. En effet, ceux-ci peuvent promouvoir l’innovation et permettre de maintenir un niveau de recherche satisfaisant dans le milieu pharmaceutique, et ce, dans l’intérêt général. Aussi, M. Chaiehloudj appelle à un traitement juridique des accords de report d’entrée marqué par le sceau de l’équilibre entre les intérêts en présence.

La thèse de M. Walid Chaiehloudj a été récompensée par le prix de thèse 2018 de la Revue Concurrences http://www.concurrences.com/fr/prix-de-these-concurrences et sera publiée au 4ème trimestre 2018 dans la collection Thèse Concurrences dirigée par le Professeur Laurence Idot